dimanche, novembre 13, 2005

Morosité municipale


On a entendu beaucoup de commentaires sur la participation électorale, à la suite des élections municipales du 6 novembre. Comme prévu, on ne peut dire que ça s’est bousculé devant les urnes. En fait, on s’est surtout précipité sur les micros pour dire combien le faible pourcentage de la participation a amené la preuve du désintérêt des Québécois envers la politique municipale, voire la politique tout court. On a pointé du doigt plusieurs facteurs, comme le mauvais temps ou l’impatience des gens à attendre en file (tiens, y’avais du monde, finalement…), comme l’absence d’enjeux cruciaux ou encore de programme électoral digne de ce nom. Je ne veux pas citer davantage, la liste est très longue.

Nonobstant ces raisons, possiblement toutes valables, il serait important d’en reprendre deux, à mon avis les plus importantes. Une de ces raison est la façon dont les médias ont couvert les campagnes électorales. À Montréal, on a eu l’impression qu’il n’y avait que deux candidats, alors qu’il y en avait quatre, dont trois avec des partis structurés. À Québec, il s’est passé la même chose. On a rapporté des informations sur les candidats Richard Bergeron (Montréal) et Claude Larose (Québec) que vers la dernière semaine de la campagne. Quand on observe les résultats à Québec, c’est assez troublant : les médias se sont concentré à suivre la candidature d’Andrée Boucher, première dans les sondages, mais aussi celle de Marc Bellemare, qui a fini troisième, avec un seul conseiller élu. On n’a pas trop évoqué la présence du successeur de Jean-Paul L’Allier à la tête de son parti, Claude Larose, pourtant devenu chef de l’opposition à l’Hôtel de ville de Québec. Idem à Montréal pour Richard Bergeron, dont le programme de son parti, Projet Montréal, avait un contenu des plus intéressant, mais on s’est contenté de rapporter platement les piques entre Gérald Tremblay et Pierre Bourque. On a eu droit à une couverture ennuyeuse, entre deux candidats aux programmes jumeaux, pour ne pas dire un duel de personnalités insignifiant. De cette façon, on n’a pas poussé davantage les électeurs à s’intéresser à ces campagnes. Peut-être avons nous eu droit à de véritables débats, à des enjeux cruciaux âprement défendus dans les autres municipalités? On dirait bien que non, hormis à Lévis, où le maire Jean Garon a été battu par une ancienne conseillère de son propre parti.

Pourtant, des décisions cruciales sont prises par les élus municipaux, mais rien n’est fait pour qu’on encourage une participation citoyenne aux débats. Devant les caméras, le même Jean Garon a affirmé bien candidement que l’opposition à l’Hôtel de ville était inutile, que les élus municipaux devaient être avant tout des gestionnaires... La mairesse de Québec, dont les années à la tête de l’ancienne municipalité de Sainte-Foy on été empreintes d’une autocratie abêtissante, a affirmé sans rire que le budget municipal devait être administrée comme celui d’une famille. On n’est pas prêt de revoir des projets d’envergure à Québec, pour ne pas dire de l’absence de fête anticipée pour le 400e anniversaire de la ville en 2008. Quand on constate également l’élection pour la cinquième reprise du maire Vaillancourt, autre personnalité proche de celle d’Andrée Boucher, Laval passera les prochaines années encore pour une ville moche au développement urbain des plus erratique. En somme, le personnel politique constituant les élus municipaux est de moins en moins visionnaire, assure un leadership des plus paternaliste et à courte vue. Gérald Tremblay, populaire de par sa prestance pour sauver des événements prestigieux à Montréal, s’est assuré pour sa presque seule personne la gestion du budget de la ville. Avec une pareille concentration de pouvoir, on n’est pas étonné de voir grandir un désintérêt pour la politique municipale.

Pour qui j’ai voté? Pour l'équipe de Projet Montréal. Voilà le genre de parti politique qui inspire davantage que les politiques municipales à la petite semaine que propose Vision Montréal, trop longtemps à la tête de cette ville. Espérons qu’à la prochaine, ce parti politique puisse se faire connaître, maintenant que « l’alternative » à l’UCIM et à Gérald Tremblay s’est fait lessiver. Sauf dans mon quartier, malheureusement…

lundi, octobre 24, 2005

Quelle lucidité?


Le manifeste « Pour un Québec lucide » a déjà fait réagir à peu près tout le monde au Québec ». De façon assez claire, on a pu constater qu’il existe bien une division politique classique gauche-droite proprement québécoise, libérée de la question nationale. Transcendant les divisions des camps souverainistes et fédéralistes, ce manifeste a fait réagir de façon positive la droite et (très) négativement la gauche, en dépit de la prétention de ses auteurs de ne pas être alignés ainsi. C’est d’ailleurs la réponse habituelle des libéraux., car pour eux il n’y aurait plus de division qui tienne il n’y a plus de classe sociale et l’idée du progrès et de la justice sociale passe par la croissance économique. Pour être honnête, voici l’accès rapide à ce manifeste : http://www.pourunquebeclucide.com/ .
Pas étonnant que j’ai réagi assez vivement. Longtemps on n’avait vu un exercice de malhonnêteté aussi peu subtile, de la part de personnalités regroupées sous le vocable « lucide », quand ils et elles proviennent du même milieu, ceux des nantis. Pas de représentants des groupes de mouvements populaires, de syndicats, de la génération montante, que des « gens de biens ». Comme l’a dit Hélène Pednault à Indicatif Présent sur Radio-Canada, « faut-il avoir un revenu de 150 000 dollars par année pour être lucide? ». Il ne manquait que les patrons de la province, la famille Desmarais, mais elle avait déjà délégué André Pratte, éditorialiste à la Presse, qui va sans aucun doute nous servir ses solutions quotidiennement à partir de ce torchon. Appuyé de son collègue Alain Dubuc, on n’a pas fini d’en entendre des belles fadaises.
Et quelles fadaises! Ainsi, pour faire face à la compétition montante de pays comme la Chine et l’Inde, il faudrait faire avec lucidité au défi. Comment? Outre le fait qu’il faudrait probablement remettre le taux de natalité à celui de nos grands-parents, ces braves qui ont fait preuve d’abnégation totale, il faudrait également avoir une qualité de vie comme en Chine et en Inde? Ça va être beau, à 65 cents de l’heure. Le succès de notre coin de pays face à deux pays ayant plus d’un milliard d’habitants chacun, de façon incomparable, serait que toutes la population brade ses acquis sociaux, reviennent à une qualité de vie d’avant les années soixante, laisse tomber sa représentation populaire et syndicale, en suivant aveuglément les « lucides » et leurs solutions éculées? La pire de celle-ci est sans aucun doute la confiance aveugle dans les partenariats publics-privés, les PPP. Partout en Occident et plus particulièrement en Grande-Bretagne, les PPP on démontré la limite de déléguer la gestion des services publics à l’entreprise privée. On n’a qu’à penser aux expériences malheureuses produites en Ontario, notamment l’autoroute 417, gérée en PPP, où le péage a doublé en un an, et la gestion des prisons dont l’une imposait le secret sur ce qu’il se passait dans ses murs et dont les gardiens, sous-payés et mal formés, ne restaient un peu moins d’un an en poste, provoquant ainsi la déstabilisation du système carcéral et les évasions à la chaîne. Il est dommage qu’au Québec, avec Jean Charest , on a le plus dogmatique des libéraux, qui porte sa foi en une panacée où partout elle a démontré son échec, mais il faut croire que notre premier ministre a une confiance en son Québec, les PPP devraient fonctionner ici, c’est certain…
La moins libérale des solution, celle du revenu minimum garanti, défendue plus mollement dans le manifeste, est elle-même un leurre. Le revenu minimum garanti n’est pas la solution que défendait Michel Chartrand, sous le vocable du « revenu de citoyenneté », mais bien la formule apportée par Charles Sirois, l’ancien patron de Télégloble Canada, dans son livre Passage obligé, passeport pour l'ère nouvelle (Paru aux Éditions de l’Homme en 1999). Il faut comprendre que la version « libérale » du revenu minimum garanti exclut le maintien des services publics… car chacun aura son revenu minimum pour payer ces services. Entre se payer l’éducation et manger, quel choix reste-t-il aux moins nantis d’entre nous?
Dans les prochains mois, il nous faudra être vigilant pour éviter qu’un programme aussi funeste soit appliqué, où est absent toute question concernant l’environnement, où l’éducation est évoqué qu’en terme de coûts et où on a évacué la qualification du montant de la dette, notamment les actifs et les infrastructures. Il va être intéressant de voir se réaligner les partis politiques, car il n’est pas certain qu’il restera de choix pour les électeurs, quand les trois partis politiques principaux seront désormais alignés sous la même bannière du libéralisme plus ou moins « néo », lorsqu’ André Boisclair sera élu chef du Parti québécois. Le manifeste de la « lucidité » aura permis au moins de montrer à la clarté du jour que la classe politique actuelle crèche à la même enseigne.Pendant ce temps, l’UFP et Option citoyenne est à créer la nouvelle machine de la riposte de gauche. Pour en finir avec la lucidité des riches.

lundi, octobre 17, 2005

Ils ne sont riches seulement parce que nous sommes pauvres


De ma courte vie professionnelle, commencée à mes seize ans en 1986, je n’ai pas connu beaucoup d’employeurs. Au moins j’ai eu la chance (si j’ose dire) de les avoirs presque tous connu personnellement. Employé dans le secteur privé, c’est quand même assez commun, les entreprises où j’ai vendu mes efforts ne furent pas des grandes, seulement de la catégorie moyenne. La proximité du patron m’est familière. Souvent, il s’agissait du fondateur, de l’entrepreneur, ce dernier terme est le préféré de ces personnalité souvent décrite comme « hors du commun », « exceptionnelle », « audacieuse » et avec d’autres termes généralement flatteurs.

Avec le recul, il m’est arrivé aussi de trouver ces personnages hors du commun, mais dans un sens inévitablement négatif. C’est cette proximité qui a probablement contribué à me donner une vision franchement enlaidie de ces « innovateurs » et ces « capitaines d’industrie » qu’ont été mes patrons. Simplement par le fait qu’ils étaient très ordinaires comme individus, je n’en ai pas connu qui m’ont donné envie de nouer des relations plus cordiale avec eux. Même qu’ils étaient tous assez moches (dans leur tête surtout, le physique ne me préoccupe pas beaucoup), je ne sais comment composer avec des amitié aussi peu naturelles, dans ces cas où je me sens repoussé par leur attitude de patron, celle qui a fait leur fortune.

La chose dont ils ont tous en commun, une qualité à en lire les journaux vantant leurs réussites (Les Affaires en autres), c’est leur avidité. Le goût d’en avoir toujours plus, d’être toujours plus riche, même si ce n’était pas des situations toujours reluisantes, ils se voient toujours en vainqueur, du moins tant qu’on ne leur demande pas un certain partage des bénéfices. Aussitôt notre demande formulée, ils se transforment en lamentables perdants, au bord du précipice, que notre demande risque de les perdre à jamais. Autrement, on les reconnaît à leur façon de plastronner, cette manière de se montrer fier d’une vie bâtie sur des sacrifices et de longs effort, surtout ceux des autres.

Le concept « avidité » me plaît bien, quand je me représente mentalement un patron. Le goût d’en avoir plus, d’être compétitif, de vouloir être le plus riche, même si on n’a pas une espérance de vie de plus de cent ans et souvent pas de descendants, pour pouvoir dépenser et léguer la richesse que peut accumuler des dizaines de travailleurs gagnant un salaire moyen pour toute une vie de salariat. J’aime beaucoup son équivalent anglais, « greed ». Le son sinistre lorsque nous le prononçons correspond bien à ce qu’il représente. Quant à la son qualificatif, « greedy », qu’on traduit par « cupide », non seulement il demeure sinistre mais il allie également une sonorité évoquant le caractère futile de la chose. Imaginer, être riche à ne plus savoir quoi faire de son fric…quelle connerie!


J’ai appris ainsi que leur richesse, c’est notre pauvreté. La pauvreté des travailleurs, stigmatisés parce qu’ils sont paresseux, n’ayant peu de qualité, ils sont ingrats, chialeurs, ignorants de leur chance et qui ne reconnaissent pas le risque que ces « innovateurs » doivent assumer, pendant qu’ils sont devant leur télé à boire de la grosse bière. Ces travailleurs qui font le crime de lèse-majesté de se syndiquer, soit se réunir comme une petite mafia pour soutirer des moyens de leurs patrons par un racket odieux, celui construit autour de la convention collective, ce contrat digne de Faust. Après tant d’effort, voilà ce que le patron moyen doit encore endurer, au lieu de profiter de la vie et des exigences d’être riche : fréquenter des riches, faire le riche, voyager en riche, s’habiller en riche, manger en riche et mourir en riche, avec une pierre tombale immense pour clamer que même mort, on est riche. Pourtant, «Vous ne l’emporterez pas au Paradis » disait un des Évangiles, et les riches que j’ai connu sont tous bêtement athées.

Pour compléter le portrait, je me suis dit qu’il faudrait quelques exemples tangibles, histoire de rendre mon bref portrait crédible. J’ai hésité, car déjà je crains que ma présentation ne verse davantage dans la démagogie dont je me soupçonne un peu. Disons que TOUS les riches ne sont PAS TOUS des cupides et ne sont PAS TOUS porté à ne pas vouloir partager leur richesse. Certains acceptent même de reconnaître la contribution de leurs employés à leur richesse, ce qui est un minimum. Ce n’est pas le cas de ces patrons que j’ai connu plus intimement.

Mais quand même, vive le syndicalisme, travailleurs de tous les pays, unissez-vous!!!

mercredi, septembre 28, 2005

Les négociations chez Renaud-Bray: déjà l'impasse?

(Le texte suivant a été publié dans le numéro 4 du bulletin Radical, de l'unité syndicale Renaud-Bray du SEPB 574)

Où en sommes-nous dans nos négociations, après le répit de l’été? Après avoir constaté ce qui reste à négocier dans les aspects normatifs de notre convention collective, soit tout ce qui est non monétaire, les employés présents lors des assemblées du 7 septembre se sont entendus pour les demandes salariales. En l’absence de la moindre indication de la part de notre employeur quant à sa capacité à répondre à nos demandes, nous avons choisi d’évaluer notre demande selon les chiffres qui nous sont disponibles, soit par le biais de l’évaluation fournie publiquement.
En effet, nous ne savons pas quelle est exactement la situation financière de Renaud-Bray. Nous ne pouvons faire autrement de déduire des informations disponibles et des activités de notre entreprise. Ainsi, nous avons trouvé les indications fournies par la direction au magazine Les Affaires, sur leur site Internet. Nous savons que l’entreprise a fait grimper son chiffre d’affaire de près de 11 millions de dollars entre 2003 et 2004. Ce même site nous apprend les montants de ses profits par année depuis 2002: malgré une hausse constante de son chiffre d’affaire, l’entreprise dégage le même montant comme bénéfice net, soit environ 1,5 millions de dollars. Nous avons donc raison de croire que l’entreprise est en mesure de partager enfin ses bénéfices avec ses employés, chose dont elle s’est bien gardée de faire depuis fort longtemps. D’autant plus que l’entreprise est loin de se comparer avec les autres entreprises du commerce au détail, comme le démontrent les informations disponibles dans ce domaine, fournies non pas par le milieu syndical mais bien par le milieu des affaires lui-même. Les membres présents lors des assemblées ont eu entre les mains le rapport paru dans le Journal de Montréal du 24 août 2005, section Votre Argent. On y apprenait notamment que les augmentations obtenues par les employés étaient en moyenne de 3.1%. Comme notre moyenne salariale est faible, nos demandes ne nous apparaissent pas démesurées.
Si l’entreprise avait voulu, jusqu'à ce jour, se compromettre de façon à nous faire comprendre qu’elle n’était pas en mesure de répondre favorablement à nos demandes, elle aurait dû agir en ce sens. Mais après le capotage de l’exercice de l’équité salariale, après avoir refusé de nous reconnaître des qualifications un moindrement plus élevées que celles de commis de magasin, après le retard perpétuel de ce même exercice attendu depuis deux ans, sans compter que nous n’avons pas obtenu de réponse favorable à notre demande de formation économique donnée par le Fonds de solidarité de la FTQ, on peut se demander déjà ce que va nous offrir la partie patronale, après le dépôts de nos demandes.
Si on a la moindre idée de ce l’entreprise va nous proposer, c’est un gel salarial pour cette année, puis une petite augmentation l’année suivante et enfin un autre gel pour 2007. Pourquoi? C’est tout ce qu’ont obtenu les groupes syndiqués avec la CSN et l’UES 800, lors de la négociation de leur contrat de travail, d’une durée de cinq ans en 2003. Comme Renaud-Bray a l’habitude de ne donner que la même chose à tous, malgré que nous sommes un groupe d’employés différent, venu négocier deux ans et demi plus tard, on ne s’attend pas à un élan de générosité de leur part.
À moins d’une surprise, bien entendu.

lundi, septembre 12, 2005

Le droit légitime de grève

Le droit de grève n’est certainement pas un droit sacré et inaliénable. Il serait étonnant toutefois qu’on revienne à une époque, pas si lointaine on s’en doute, où il était interdit aux travailleurs de refuser de travailler, selon le processus prévu par les lois du travail actuels. Pourtant, à lire la prose démagogique des lecteurs de La Presse, triée par la direction du même journal, on n’est pas loin de voir une demande politique en ce sens.
Ces dérives d’une catégorie de la population, peu renseignée de l’histoire et du droit du travail, d’aller jusqu’à exiger une interdiction du droit de grève, un droit par ailleurs obtenu de longues luttes. Les plus réalistes se contentent de dénigrer ce droit, en le qualifiant de « dépassé », de « rétrograde » ou de « préhistorique ». Un sondage récent a confirmé la tendance : bien que majoritairement acquis à la cause des employé(e)s de l’État, les répondants étaient par contre opposés à des moyens de pressions tout comme la grève. Que les syndiqué(e)s obtiennent leur dû, certes, mais sans rien faire d’autre que négocier. Quel paradoxe! Pourtant, on ignore que 95% des négociations se termine par un règlement, sans passer par la grève ou par le lock-out.

Mais bien sûr, la faute incombe toujours au employé(e)s syndiqué(e)s, opposés perpétuellement à la modernité qu’est la « flexibilité » et autres pirouettes lexicales pour justifier des baisses d’avantages sociaux, quand ce n’est pas les salaires, au nom de la sacro-sainte compétitivité sur le sacro-saint marché international. Il faudra expliquer un jour, à ces éditorialiste et à ces économistes des grands journaux Gesca et Québecor, que les marchés doivent aussi composer avec les consommateurs. Ceux-ci ne participent pas à un marché compétitif, pas avec des coupures de salaires et des réductions de temps de travail. Mais pour nos brillants économistes et journalistes, abreuvés des théories néo-libérales, notamment celles où est privilégié l’offre, un produit performant fabriqué à moindre coût, dans un contexte utopique d’un marché parfaitement réglé au quart de tour et avec une saine compétition, des employé(e)s soumis aux diktats de leur idéologie économique n’est qu’une condition sine qua none de leur propre enrichissement. Après, on se demandera pourquoi le travailleur occidental, passé à la tordeuse des transformations et autres modernisations de l’économie se sent davantage découragé, quand il n’est pas au chômage, n’apparaît pas plus sympathique à la mondialisation et à la cause patronale.
Aussi bien l’admettre, on n’est pas près de laisser l’action ultime, la grève, simplement pour se voir au diapason de la modernité, selon la version patronale de La Presse.

La liberté d'expression et Renaud-Bray: nos excuses.

Comme vous pouvez le constater, j’ai dû laisser tomber un texte, qualifié au départ comme un exercice. Nous avions tenté de provoquer nos patrons, en laissant traîner quelques informations et « critiques », histoire d’emmerder sérieusement l’entreprise qu’est Renaud-Bray. Sauf qu’à la relecture, on a décidé d’effacer ce texte, étant donné les constats suivants :
-nos collègues risquaient également de subir des pressions de la direction;
-on risquait nous-même des poursuites en justice, pour diffamation et autres;
-il y avait une information confidentielle;
-le ton était fortement teinté de démagogie, ce à quoi nous sommes opposé.
Il existe un temps où il est préférable de réfréner sa colère et son indignation. C’est pourquoi il est préférable de s’employer à des tâches plus constructives, comme ce le sera pour les prochains textes.

mardi, septembre 06, 2005

Sans l'État...

Je me souviens de la maxime de l’actuel gouvernement québécois, dévoilé lorsque celui-ci a déposé son premier budget. Non, ce n’était pas « Nous sommes prêts », ça c'était le slogan électoral. Yves Séguin, alors ministre des finances et vedette de l’équipe libéral, annonça la couleur de ce gouvernement par cette phrase :

« Ne vous demandez pas ce que l’État peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire SANS l’État ».

Voilà. Le mot était lancé, les libéraux allaient appliquer l’idéologie libérale du désengagement et de la privatisation. On a vu par la suite Monique Jérôme-Foget, toujours présidente du Conseil du trésor et admiratrice de Friedrich von Hayek, aller de sa déclaration loufoque : « Chéri, j’ai réduit l’État ». En grosse lettre sur le magazine l’Actualité. Comme si c’était vraiment leur mandat, clairement exigé par la population.
Voilà que nous en sommes à se demander si cette élection a été parfaitement agencé avec une hausse aberrante du coût de l’essence, pour que nous en soyons réduit à courir les pompes affichant le litre à 1.30$. Nous avons entendu alors « Mais que fait le gouvernement? ». Mais voyons, les ministre de Jean Charest vous l’ont dit, oubliez l’intervention de l’État, il s’est désengagé. Et puis de toute façon, ce n’est pas une juridiction provinciale, d’autant plus que le Québec, on n’y trouve pas encore de pétrole. Et le grand frère libéral à Ottawa? Même son de cloche : « on n’y peut rien, c’est une conjoncture internationale ». Hé bien voilà, il faudra s’y faire, comme les Français, il ne nous reste plus qu’à plonger la main dans sa poche…

Si ce n’est que l’essence, on se dit quand même, on ne se trouve pas si mal, quand on regarde la Nouvelle-Orléans, on se trouve bien ici, quitte à souhaiter l’arrivée de l’hiver… mais voilà, là-bas aussi, les gens se sont fait dire « On a réduit l’État, on a réduit les impôts, vous êtes libres et responsables, sachez faire sans l’apport de l’État. » Donc en absence d’un État digne de ce nom, on a laissé se dégrader les digues protégeant la ville, au profit des baisses d’impôts. Par ce dernier fait, on a oublié de mettre à jour un plan sérieux en cas de catastrophe, toujours possible celui-là. Et finalement, lorsqu’il a fallu intervenir, on a vu à la télévision à quoi l’État servait, une fois réduit et désengagé de son rôle social : protéger la propriété privée. Il a été plus urgent d’envoyer des hommes en arme plutôt que des secouristes, ceux-ci étant retardé dans leur démarche par l’arrivée des gardes nationaux et des troupes régulières, avec l’impérative priorité d’abattre à vue les « pillards », souvent des êtres affamés surpris avec de la nourriture avariée prise au Wal-Mart du coin…et il paraît qu’il faut abattre des voleurs, maintenant, le vol est punissable de mort, désormais…

Voilà ce que nous mène la réduction de l’État, les coupes dans les dépenses sociales, le retard des réinvestissements dans les infrastructures, l’obsession de la lutte au déficit, le désengagement, la déréglementation, la réduction ou l’abolition des impôts. Le navrant spectacle vu en Louisiane, espérons-le, fera peut-être réfléchir les meneurs de claque du libre-marché et autre lubies néo-libérales. Car nous non plus, nous ne sommes pas à l’abris des « Actes de Dieu », comme en janvier 1998…

dimanche, août 21, 2005

La barbarie ordinaire

Il est toujours étonnant d’entendre aujourd’hui un discours en faveur de la peine de mort. Pourtant, il nous arrive encore de voir, périodiquement, des appels aux meurtres organisés, notamment lorsqu’un criminel crapuleux présumé est accusé devant la justice. On a vu à l’occasion une foule rassemblée derrière les clôtures d’un établissement carcéral, avertie à l’avance du passage imminent de l’individu, afin de réclamer sa tête. Chauffards ivres et meurtriers, pédophiles, assassins sadiques, violeurs, tous présumés innocents selon notre système de justice, aux dernières nouvelles toujours en vigueur, mais déjà condamnés par avance par cette foule vengeresse.
Nous avons tourné le dos, en tant que société, à une forme de barbarie assimilée à la sanction ultime de la justice. La peine de mort, peu importe la façon dont elle est appliquée, a été, dans la majeur des pays occidentaux, une des dernière manifestation collective et institutionnalisée de « l’instinct de mort » présent chez l’être humain, cette soif irrationnelle et assassine de s’en prendre à son prochain pour les raisons les plus diverses : sanction du crime (réel ou imaginaire), déclaration de guerre, émeutes organisées (pogromes), etc. Dans les nombreuses déclarations mettant un terme à la peine de mort, nous nous sommes permis de croire à l’avènement définitif d’une société moderne, une fois cette étape franchie : proclamation du caractère sacré de la vie humaine, mise en évidence de la double torture que constitue cette sanction (l’attente de la peine et celle-ci), dénonciation de la violence institutionnalisée, réhabilitation pour tous, etc.
Quand je revois ces enragés, criant leur indignation et réclamant une justice immédiate, c’est la barbarie ordinaire que je vois, celle des petites gens aigries, avides de l’immédiat en tout, même celle de la justice, quitte à créer une injustice. C’est l’argument principal des partisans du retour à la peine de mort : « Qu’ils meurent tous, même si quelques uns étaient innocents, justice est faite ». On a vu cette façon de voir sur des drapeaux guerriers, ça se résume à « Kill’ em all and let’s God sort them out », en vente un peu partout dans les boutiques de T-shirts. En bref, une belle régression en perspective.
On pourrait me rétorquer que je m’inquiète pour des riens, que personnes ne portent attention à ces enragés de la potence, que les cameramen des médias filment les vociférations pour faire de la nouvelle. Peut-être. Quand même, ces personnes ne sont pas là pour rien, on les avait prévenues. Qui sont-ils justement, ceux qui les alertent soir après soir, dans les bulletins de nouvelles ou ailleurs, de la hausse vertigineuse du crime, qu’il faut revenir à des pratiques d’un autre âge pour dissuader les criminels? Pourquoi pas diffuser à la télévision l’exécution des criminels, tant qu’à y être? On a laissé trop longtemps le crachoir aux démagogues de la droite, ceux-là même qui ont l’estime des aigris et des craintifs, les Gilles Proulx, Jean-Luc Mongrain et Stéphane Gendron de ce monde, pour que nous retournions à la barbarie. Comme on sait l’importance de leur auditoire, pas étonnant d’entendre que le nombre des partisans au retour à la peine de mort est en hausse, au point de ramener le débat dans nos institutions. Dans cette société, nous avons choisi que tous avaient la possibilité d’être jugé. Ne laissons pas les démagogues nous ramener à l’âge de la potence.

Et les chiffres? Vous les sortez d'où?

À lire La Presse ces derniers jours, on dirait que le mot d'ordre de s'en prendre aux syndicats, voire au syndicalisme en général, provient du bureau du premier ministre Charest. Non seulement les éditorialistes se relaient pour avertir les syndiqué(e)s du secteur publique de revoir leur demande à la baisse, voilà que le grand rédacteur économique Claude Piché, celui là même qui écrivait "y'a pas de pauvre à Montréal" les prévient: selon lui, l'État québécois frôlent la faillite si jamais les syndiqué(e)s n'obtempèrent pas à la "ligne dure" du gouvernement.

À défaut d'être moindrement crédible, hors du cercle des fanatiques du marché et du mantra de la "main-invisible-qui règle-tout-en-concurrence-parfaite", M. Piché aurait eu moindrement la décence, s'il veut être sérieux dans sa démarche, de fournir ses références quand il cite des chiffres. À en croire ce qu'il a écrit, aussi bien quitter la province, on est endetté plus que n'importe quel citoyen sur la planète. Fini les projets, donnons toute la richesse collective au règlement de notre dette et au diable le reste, l'entreprise privée s'en occupera. quand aux syndiqué(e)s, qu'est-ce qu'ils font là à demander quelque chose à l'État? Assez simple comme raisonnement, non?