mercredi, septembre 28, 2005

Les négociations chez Renaud-Bray: déjà l'impasse?

(Le texte suivant a été publié dans le numéro 4 du bulletin Radical, de l'unité syndicale Renaud-Bray du SEPB 574)

Où en sommes-nous dans nos négociations, après le répit de l’été? Après avoir constaté ce qui reste à négocier dans les aspects normatifs de notre convention collective, soit tout ce qui est non monétaire, les employés présents lors des assemblées du 7 septembre se sont entendus pour les demandes salariales. En l’absence de la moindre indication de la part de notre employeur quant à sa capacité à répondre à nos demandes, nous avons choisi d’évaluer notre demande selon les chiffres qui nous sont disponibles, soit par le biais de l’évaluation fournie publiquement.
En effet, nous ne savons pas quelle est exactement la situation financière de Renaud-Bray. Nous ne pouvons faire autrement de déduire des informations disponibles et des activités de notre entreprise. Ainsi, nous avons trouvé les indications fournies par la direction au magazine Les Affaires, sur leur site Internet. Nous savons que l’entreprise a fait grimper son chiffre d’affaire de près de 11 millions de dollars entre 2003 et 2004. Ce même site nous apprend les montants de ses profits par année depuis 2002: malgré une hausse constante de son chiffre d’affaire, l’entreprise dégage le même montant comme bénéfice net, soit environ 1,5 millions de dollars. Nous avons donc raison de croire que l’entreprise est en mesure de partager enfin ses bénéfices avec ses employés, chose dont elle s’est bien gardée de faire depuis fort longtemps. D’autant plus que l’entreprise est loin de se comparer avec les autres entreprises du commerce au détail, comme le démontrent les informations disponibles dans ce domaine, fournies non pas par le milieu syndical mais bien par le milieu des affaires lui-même. Les membres présents lors des assemblées ont eu entre les mains le rapport paru dans le Journal de Montréal du 24 août 2005, section Votre Argent. On y apprenait notamment que les augmentations obtenues par les employés étaient en moyenne de 3.1%. Comme notre moyenne salariale est faible, nos demandes ne nous apparaissent pas démesurées.
Si l’entreprise avait voulu, jusqu'à ce jour, se compromettre de façon à nous faire comprendre qu’elle n’était pas en mesure de répondre favorablement à nos demandes, elle aurait dû agir en ce sens. Mais après le capotage de l’exercice de l’équité salariale, après avoir refusé de nous reconnaître des qualifications un moindrement plus élevées que celles de commis de magasin, après le retard perpétuel de ce même exercice attendu depuis deux ans, sans compter que nous n’avons pas obtenu de réponse favorable à notre demande de formation économique donnée par le Fonds de solidarité de la FTQ, on peut se demander déjà ce que va nous offrir la partie patronale, après le dépôts de nos demandes.
Si on a la moindre idée de ce l’entreprise va nous proposer, c’est un gel salarial pour cette année, puis une petite augmentation l’année suivante et enfin un autre gel pour 2007. Pourquoi? C’est tout ce qu’ont obtenu les groupes syndiqués avec la CSN et l’UES 800, lors de la négociation de leur contrat de travail, d’une durée de cinq ans en 2003. Comme Renaud-Bray a l’habitude de ne donner que la même chose à tous, malgré que nous sommes un groupe d’employés différent, venu négocier deux ans et demi plus tard, on ne s’attend pas à un élan de générosité de leur part.
À moins d’une surprise, bien entendu.

lundi, septembre 12, 2005

Le droit légitime de grève

Le droit de grève n’est certainement pas un droit sacré et inaliénable. Il serait étonnant toutefois qu’on revienne à une époque, pas si lointaine on s’en doute, où il était interdit aux travailleurs de refuser de travailler, selon le processus prévu par les lois du travail actuels. Pourtant, à lire la prose démagogique des lecteurs de La Presse, triée par la direction du même journal, on n’est pas loin de voir une demande politique en ce sens.
Ces dérives d’une catégorie de la population, peu renseignée de l’histoire et du droit du travail, d’aller jusqu’à exiger une interdiction du droit de grève, un droit par ailleurs obtenu de longues luttes. Les plus réalistes se contentent de dénigrer ce droit, en le qualifiant de « dépassé », de « rétrograde » ou de « préhistorique ». Un sondage récent a confirmé la tendance : bien que majoritairement acquis à la cause des employé(e)s de l’État, les répondants étaient par contre opposés à des moyens de pressions tout comme la grève. Que les syndiqué(e)s obtiennent leur dû, certes, mais sans rien faire d’autre que négocier. Quel paradoxe! Pourtant, on ignore que 95% des négociations se termine par un règlement, sans passer par la grève ou par le lock-out.

Mais bien sûr, la faute incombe toujours au employé(e)s syndiqué(e)s, opposés perpétuellement à la modernité qu’est la « flexibilité » et autres pirouettes lexicales pour justifier des baisses d’avantages sociaux, quand ce n’est pas les salaires, au nom de la sacro-sainte compétitivité sur le sacro-saint marché international. Il faudra expliquer un jour, à ces éditorialiste et à ces économistes des grands journaux Gesca et Québecor, que les marchés doivent aussi composer avec les consommateurs. Ceux-ci ne participent pas à un marché compétitif, pas avec des coupures de salaires et des réductions de temps de travail. Mais pour nos brillants économistes et journalistes, abreuvés des théories néo-libérales, notamment celles où est privilégié l’offre, un produit performant fabriqué à moindre coût, dans un contexte utopique d’un marché parfaitement réglé au quart de tour et avec une saine compétition, des employé(e)s soumis aux diktats de leur idéologie économique n’est qu’une condition sine qua none de leur propre enrichissement. Après, on se demandera pourquoi le travailleur occidental, passé à la tordeuse des transformations et autres modernisations de l’économie se sent davantage découragé, quand il n’est pas au chômage, n’apparaît pas plus sympathique à la mondialisation et à la cause patronale.
Aussi bien l’admettre, on n’est pas près de laisser l’action ultime, la grève, simplement pour se voir au diapason de la modernité, selon la version patronale de La Presse.

La liberté d'expression et Renaud-Bray: nos excuses.

Comme vous pouvez le constater, j’ai dû laisser tomber un texte, qualifié au départ comme un exercice. Nous avions tenté de provoquer nos patrons, en laissant traîner quelques informations et « critiques », histoire d’emmerder sérieusement l’entreprise qu’est Renaud-Bray. Sauf qu’à la relecture, on a décidé d’effacer ce texte, étant donné les constats suivants :
-nos collègues risquaient également de subir des pressions de la direction;
-on risquait nous-même des poursuites en justice, pour diffamation et autres;
-il y avait une information confidentielle;
-le ton était fortement teinté de démagogie, ce à quoi nous sommes opposé.
Il existe un temps où il est préférable de réfréner sa colère et son indignation. C’est pourquoi il est préférable de s’employer à des tâches plus constructives, comme ce le sera pour les prochains textes.

mardi, septembre 06, 2005

Sans l'État...

Je me souviens de la maxime de l’actuel gouvernement québécois, dévoilé lorsque celui-ci a déposé son premier budget. Non, ce n’était pas « Nous sommes prêts », ça c'était le slogan électoral. Yves Séguin, alors ministre des finances et vedette de l’équipe libéral, annonça la couleur de ce gouvernement par cette phrase :

« Ne vous demandez pas ce que l’État peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire SANS l’État ».

Voilà. Le mot était lancé, les libéraux allaient appliquer l’idéologie libérale du désengagement et de la privatisation. On a vu par la suite Monique Jérôme-Foget, toujours présidente du Conseil du trésor et admiratrice de Friedrich von Hayek, aller de sa déclaration loufoque : « Chéri, j’ai réduit l’État ». En grosse lettre sur le magazine l’Actualité. Comme si c’était vraiment leur mandat, clairement exigé par la population.
Voilà que nous en sommes à se demander si cette élection a été parfaitement agencé avec une hausse aberrante du coût de l’essence, pour que nous en soyons réduit à courir les pompes affichant le litre à 1.30$. Nous avons entendu alors « Mais que fait le gouvernement? ». Mais voyons, les ministre de Jean Charest vous l’ont dit, oubliez l’intervention de l’État, il s’est désengagé. Et puis de toute façon, ce n’est pas une juridiction provinciale, d’autant plus que le Québec, on n’y trouve pas encore de pétrole. Et le grand frère libéral à Ottawa? Même son de cloche : « on n’y peut rien, c’est une conjoncture internationale ». Hé bien voilà, il faudra s’y faire, comme les Français, il ne nous reste plus qu’à plonger la main dans sa poche…

Si ce n’est que l’essence, on se dit quand même, on ne se trouve pas si mal, quand on regarde la Nouvelle-Orléans, on se trouve bien ici, quitte à souhaiter l’arrivée de l’hiver… mais voilà, là-bas aussi, les gens se sont fait dire « On a réduit l’État, on a réduit les impôts, vous êtes libres et responsables, sachez faire sans l’apport de l’État. » Donc en absence d’un État digne de ce nom, on a laissé se dégrader les digues protégeant la ville, au profit des baisses d’impôts. Par ce dernier fait, on a oublié de mettre à jour un plan sérieux en cas de catastrophe, toujours possible celui-là. Et finalement, lorsqu’il a fallu intervenir, on a vu à la télévision à quoi l’État servait, une fois réduit et désengagé de son rôle social : protéger la propriété privée. Il a été plus urgent d’envoyer des hommes en arme plutôt que des secouristes, ceux-ci étant retardé dans leur démarche par l’arrivée des gardes nationaux et des troupes régulières, avec l’impérative priorité d’abattre à vue les « pillards », souvent des êtres affamés surpris avec de la nourriture avariée prise au Wal-Mart du coin…et il paraît qu’il faut abattre des voleurs, maintenant, le vol est punissable de mort, désormais…

Voilà ce que nous mène la réduction de l’État, les coupes dans les dépenses sociales, le retard des réinvestissements dans les infrastructures, l’obsession de la lutte au déficit, le désengagement, la déréglementation, la réduction ou l’abolition des impôts. Le navrant spectacle vu en Louisiane, espérons-le, fera peut-être réfléchir les meneurs de claque du libre-marché et autre lubies néo-libérales. Car nous non plus, nous ne sommes pas à l’abris des « Actes de Dieu », comme en janvier 1998…