lundi, septembre 12, 2005

Le droit légitime de grève

Le droit de grève n’est certainement pas un droit sacré et inaliénable. Il serait étonnant toutefois qu’on revienne à une époque, pas si lointaine on s’en doute, où il était interdit aux travailleurs de refuser de travailler, selon le processus prévu par les lois du travail actuels. Pourtant, à lire la prose démagogique des lecteurs de La Presse, triée par la direction du même journal, on n’est pas loin de voir une demande politique en ce sens.
Ces dérives d’une catégorie de la population, peu renseignée de l’histoire et du droit du travail, d’aller jusqu’à exiger une interdiction du droit de grève, un droit par ailleurs obtenu de longues luttes. Les plus réalistes se contentent de dénigrer ce droit, en le qualifiant de « dépassé », de « rétrograde » ou de « préhistorique ». Un sondage récent a confirmé la tendance : bien que majoritairement acquis à la cause des employé(e)s de l’État, les répondants étaient par contre opposés à des moyens de pressions tout comme la grève. Que les syndiqué(e)s obtiennent leur dû, certes, mais sans rien faire d’autre que négocier. Quel paradoxe! Pourtant, on ignore que 95% des négociations se termine par un règlement, sans passer par la grève ou par le lock-out.

Mais bien sûr, la faute incombe toujours au employé(e)s syndiqué(e)s, opposés perpétuellement à la modernité qu’est la « flexibilité » et autres pirouettes lexicales pour justifier des baisses d’avantages sociaux, quand ce n’est pas les salaires, au nom de la sacro-sainte compétitivité sur le sacro-saint marché international. Il faudra expliquer un jour, à ces éditorialiste et à ces économistes des grands journaux Gesca et Québecor, que les marchés doivent aussi composer avec les consommateurs. Ceux-ci ne participent pas à un marché compétitif, pas avec des coupures de salaires et des réductions de temps de travail. Mais pour nos brillants économistes et journalistes, abreuvés des théories néo-libérales, notamment celles où est privilégié l’offre, un produit performant fabriqué à moindre coût, dans un contexte utopique d’un marché parfaitement réglé au quart de tour et avec une saine compétition, des employé(e)s soumis aux diktats de leur idéologie économique n’est qu’une condition sine qua none de leur propre enrichissement. Après, on se demandera pourquoi le travailleur occidental, passé à la tordeuse des transformations et autres modernisations de l’économie se sent davantage découragé, quand il n’est pas au chômage, n’apparaît pas plus sympathique à la mondialisation et à la cause patronale.
Aussi bien l’admettre, on n’est pas près de laisser l’action ultime, la grève, simplement pour se voir au diapason de la modernité, selon la version patronale de La Presse.

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