dimanche, janvier 13, 2008

Que veut George W. Bush?

Je me suis interrogé sur les motivations actuelles du président américain et de son équipe, suite à leur passage dans les territoires palestiniens occupés et en Israël, cette semaine. Sur le coup, ce voyage m’avait apparu comme une nouvelle lubie de George W. Bush : tenter de faire oublier un bilan désastreux de sa présidence, en obtenant ce que nul n’ose croire, soit une solution au conflit israélo-palestinien. En effet, sachant que sa dernière année comme président ne le réhabilitera pas davantage, aux yeux de ses chers concitoyens, on pourrait être tenté de croire que la création d’un État palestinien et la reconnaissance des frontières israéliennes par les États arabes, devenu possibles après quelques adroites manœuvres diplomatiques, feraient oublier les échecs de sa politique étrangère. Peu importe ce qu’en disent les néo-conservateurs, convaincus de la justesse de leur vision du monde, il y a bien peu de gens au États-Unis qui croient que le sort du monde est meilleur, depuis l’avènement de l’équipe de Bush au gouvernement.

En effet, Bush ne sera pas le seul dirigeant à faire de sa dernière année de pouvoir celle que les historiens et les politologues retiendront. On a eu un premier ministre canadien qui a tenté la même chose, en 1984. Pierre Eliott Trudeau, à la dernière année de son mandat, avait eu en tête de proposer un « plan de paix » aux chefs d’États du monde. Dans son évidente vanité, on a pu voir le premier ministre visiter les différents pays du monde, aux frais des contribuables, afin d’intéresser ses homologues à un nébuleux projet de paix mondial. Il cherchait sans doute à obtenir le prix Nobel de la paix, comme son prédécesseur, Lester B. Pearson. Alors qu’un électricien de chantier naval polonais nommé Lech Walesa l’avait obtenu l’année d’avant, en dirigeant un syndicat autonome, pourquoi pas lui? Ça ferait oublier à ses concitoyens la désastreuse politique énergétique, qui a aliéné l’ouest canadien à son parti et à sa mémoire, lorsque ces provinces ne pouvaient obtenir davantage de la manne pétrolière dès cette époque, retardant de quinze ans l’essor économique de ces régions. Pas de chance pour lui, cette année-là un sud-africain l'a obtenu, l’archevêque anglican Desmond Tutu, faisant oublier ses courbettes qu’il avait été faire à Ronald Reagan et à Margaret Thatcher…





Trudeau, dans un moment très représentatif...

Voir George W. Bush se déplacer pour aller voir le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, lui promettre l’impensable de sa part, alors qu’il vouait Yasser Arafat aux gémonies, c’étais quand même un grand moment. Mieux encore, lorsque le même Bush se met à condamner la colonisation sioniste en Cisjordanie, je me suis dit que sans doute, il tente sa chance pour le prix Nobel à son tour…tant qu’à faire dans le candide, aussi imaginer que lui et Condolezza Rice ont remonté les bretelles à Ehud Olmert, lui qui semble incapable de tenir tête à l’extrême-droite de son pays et lui empêcher de continuer le vol des terre palestiniennes. On pouvait rêver…

En fait, le désenchantement est venu avec cette autre nouvelle, lorsqu’un navire de guerre américain a reçu des « menaces » par des bouffons en canots à moteurs, dans le détroit d’Ormuz. Ça m’a aussitôt rappelé cet événement funeste, survenu il y a plus de quarante ans, que l’on a nommé l’incident du Golfe Tonkin. Un événement similaire avait mené à l’engagement militaire des États-Unis au Vietnam. Certes, il aurait été maladroit, de la part des stratèges militaires du Pentagone, de reprendre la même histoire, pour faire avaler à la nation l’ouverture d’un autre front, alors qu’en Irak on ne semble pas voir l’ombre d’une accalmie. Quand même, on a vu ce que l’on imaginait le pire à venir, soit la menace directe du président Bush contre la République islamique d’Iran, le lendemain de cet incident. C’est à cet instant qu’on a pu voir la signification de ce voyage, pour l’équipe Bush.

La création d’un État palestinien, les garanties inévitables à Israël, ce sont les préludes à une intervention militaire en Iran. La visite de Bush aux États et royaumes arabes de la région vont probablement concrétiser ce qui semble être une préparation du terrain, avant le conflit qui se dessine. Bien sûr, aucun État de cette région ne va appuyer les Américains à entrer en guerre contre l’Iran. C’est ce qu’on a pu entendre de leur part. Mais dans le contexte où Bush et son entourage vont s’employer à prouver que l’État iranien est un État voyou, voué à propager et encourager le terrorisme au Liban (par le biais du Hezbollah), en Afghanistan (en armant les Talibans), en Israël (par le biais du Hamas) et en Irak (en armant les insurgés chiites), on verra bien qu’un après l’autre, ces oppositions vont s’amoindrir…contre un échange qui va prendre tout son importance. L’obtention d’un État palestinien va être la monnaie de cet échange.

Il a été remarquable de voir le peu d’enthousiasme qu’ont affichés les principaux intéressés, à cette visite de George W. Bush en Palestine. La population palestinienne n’est pas dupe, au prise avec une situation intenable, entre une immense prison à ciel ouvert qu’est la Bande de Gaza et un état d’apartheid. Elle se voit réduite à servir dans un compromis ouvrant la voie vers une guerre en Iran, prise en otage par l’ambition des néo-conservateurs entourant le président Bush de venir à bout du pouvoir grandissant de l’Iran au Moyen-Orient.




Le prix Nobel de la paix à George W. Bush? Possiblement dans mes pires cauchemars, mais au rythme où mes cauchemars se réalisent dans le monde…

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